Étude socio-historique et culturelle de l’extinction du loup d’Ezo au Japon
- Suda Hiroko すだDOGファーム
- 29 sept.
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1. Introduction
Cet article, fondé sur l’entrée Ameblo « Histoire des loups au Japon, Partie II : l’extinction du loup d’Ezo », analyse le processus d’extinction du loup d’Ezo (Canis lupus hattai) durant l’ère Meiji. L’examen adopte une perspective multidimensionnelle, prenant en compte les changements environnementaux, les facteurs socio-économiques, les dynamiques culturelles et les politiques publiques.
2. La culture aïnou et le loup d’Ezo

Les Aïnous considéraient le loup avec révérence, le nommant Horokeu ou Ōsekamui, et l’honoraient, au même titre que l’ours, lors des rituels iomante (cérémonies d’envoi des esprits).
Ainsi, le loup n’était pas perçu comme un simple animal, mais comme un être spirituel et religieux.
Les motifs de loups sculptés utilisés comme armoiries, ainsi que les récits épiques de yukar décrivant les exploits des loups, témoignent également de leur place fondamentale dans la culture autochtone aïnoue.
3. Conflit avec la société wajin et début de l’extermination
À partir de la fin de l’époque d’Edo, l’installation des Wajin (colons japonais) à Hokkaidō entraîna une recrudescence des attaques de bétail par les loups. À Hakodate notamment, des demandes de prêt d’armes à feu furent déposées, illustrant une pression sociale croissante.
Note : À cette époque, le loup du Japon (Canis lupus hodophilax) déclinait également à cause des épidémies de rage, ce qui renforça probablement une perception négative des loups en général.
4. L’ère Meiji : modernisation et politiques de destruction

Après la Restauration de Meiji, le développement rapide et l’essor de l’élevage transformèrent le loup en « animal nuisible » à éradiquer.
Le cas le plus marquant fut l’usage d’appâts empoisonnés à la strychnine, introduit par Edwin Dun, permettant d’exterminer des meutes entières en une seule nuit.La Commission de colonisation (Kaitakushi) instaura également un système de primes, augmentant progressivement les récompenses pour encourager la chasse aux loups, ce qui accéléra leur disparition à l’échelle de l’île.
5. Statistiques de capture et pressions environnementales

Les campagnes d’extermination furent soigneusement recensées, atteignant un pic entre la fin des années 1870 et le début des années 1880 (ex. : 432 loups tués en 1886).
Parallèlement, des phénomènes climatiques extrêmes (fortes chutes de neige, tempêtes) entraînèrent la mort massive des cerfs d’Ezo, principale proie des loups, réduisant encore leurs ressources vitales.
6. Facteurs écologiques et mécanismes de déclin
Du point de vue zoologique, la sociabilité des loups et leur besoin alimentaire élevé en hiver contribuèrent à leur disparition rapide. Contrairement aux ours solitaires, les loups étaient éliminés par groupes entiers, ce qui accéléra l’effondrement de leur population.
7. La phase finale de l’extinction

À l’époque d’avant-guerre, même l’intérêt touristique pour le loup disparut. Les observations directes devinrent extrêmement rares, et son extinction fut perçue comme un fait accompli, tant socialement que culturellement.
Aujourd’hui, il ne subsiste que quelques spécimens : deux loups naturalisés (mâle et femelle) et deux crânes, soulignant la carence de données scientifiques.
8. Perspective complémentaire : confusion avec les chiens errants
L’article mentionne aussi des cas de confusion entre les loups et les yama-inu (chiens japonais redevenus sauvages). Ces erreurs, souvent relayées par les rumeurs et traditions, ont probablement entravé les recherches ultérieures sur la véritable histoire du loup.
Conclusion : synthèse et portée interdisciplinaire

L’extinction du loup d’Ezo ne fut pas un simple phénomène écologique. Elle résulte de la collision entre la culture aïnoue et l’État moderne, des bouleversements environnementaux, de politiques de répression et de perceptions culturelles erronées.
Il est désormais nécessaire de réévaluer les rares sources existantes — spécimens naturalisés, fragments osseux, récits folkloriques et traditions orales — et de promouvoir une recherche interdisciplinaire à l’intersection de l’histoire, de l’anthropologie culturelle et de la zoologie.
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